LA CAROTTE, Hu Luo Bo par Jean Pélissier professeur en MTC
La Carotte, Hu Luo Bo, est connue pour ses vertus médicinales depuis des millénaires en Chine.
A l’heure actuelle, c’est le légume dont la culture est la plus répandue sur terre, 35% de la production mondiale venant de Chine.
Au départ, elle était blanchâtre, très ligneuse et uniquement réservée à la médecine.
Ensuite, à force de croisements, elle a pris la couleur orange que l’on connaît et est devenue un légume courant.
Bien qu’il existe tout un panel de couleurs, je vais m’intéresser, dans cette étude, à la carotte orange que l’on connaît tous.
Que dit la médecine chinoise ?
La carotte crue est de saveur très légèrement amère et piquante, Xin. Beaucoup moins cependant que le navet.
Ce goût disparaît d’ailleurs totalement à la cuisson. Elle devient alors douce. Nous savons que la saveur douce, sucrée, a comme propriété de favoriser la production de sang et d’énergie, de même que les liquides organiques.
Elle humidifie l’organisme et agit comme fortifiant général.
Sa nature est modérée, neutre. Cependant, en tant qu’alicament, elle est considérée comme très légèrement rafraîchissante et lubrifiante.
C’est un légume qui sera donc bon à consommer pour les personnes qui sont en état Xu, de faiblesse.
Les vertus thérapeutiques de Hu Lui Bo vont aller prioritairement vers les méridiens et les organes :
Poumon,
Foie et
Rate.
*Une de ses principales propriétés est de « décontracter et de dégager le diaphragme en favorisant le travail de la digestion de l’intestin et de l’estomac. »
Il est dit « que la carotte élargit le milieu, fait baisser le Qi et dissipe les stagnations perverses au niveau de l’estomac ».
Ceci est dû au fait que la carotte tonifie la rate qui est le chef d’orchestre de la digestion du bol alimentaire. C’est donc un légume très utile en cas d’indigestion, de ballonnement, de distension abdominale.
La carotte est très précieuse chez les enfants dénutris, anémiques et qui n’ont pas d’appétit. Une très bonne recette dans ce profil de déséquilibre :
« Couper en lamelle dans le sens de la longueur une belle carotte bio. La faire revenir dans une poêle ou un wok avec de l’huile de sésame en y rajoutant de de la ciboule et du gingembre frais coupé en petit morceaux »
*Une autre propriété très intéressante est celle d’humidifier les intestins, de lutter contre la sécheresse du gros intestin.
N’oublions pas que Poumon et Gros Intestin sont directement liés en M.T.C. et donc l’action de tonifier le Poumon a un effet direct sur les problèmes de constipation, de selles sèches.
La carotte est donc considérée comme un laxatif doux.
Par exemple, le fait de boire en 4 ou 5 fois par jour 40cc (un petit verre) de jus de carotte fraîchement extrait, permet de lutter contre la constipation commune. L’action peut être augmentée quand on prend du jus de carotte avec du miel.
*Une autre action. Nous avons vu qu’un des « logiciels-organes » cible de la carotte était le Foie. Or, nous savons que les yeux, en M.T.C. sont l’ouverture du Foie.
Par cette action de nourrir le Foie, les textes anciens disent que « la carotte « éclaircit » les yeux ».
En effet, ce légume pris régulièrement a pour action de lutter contre la baisse de l’acuité visuelle, ce que l’on appelle l’héméralopie. Elle permet aussi de lutter contre la sécheresse des yeux.
Une recette traditionnelle en cas de fatigue visuelle :
« On coupe en lamelles dans le sens de la longueur une carotte bio. On la fait sauter dans de l’huile de sésame. On y ajoute 30 gr de céleri branche coupé en morceaux et 30 gr d’algue laminaire réhydratée. Ce plat se consomme avec du riz et l’idéal est de rajouter du foie de volaille ou d’agneau ».
*Elle agit aussi directement sur l’énergie du poumon. Non seulement, elle favorise la lubrification, l’humidification de cet organe, mais surtout elle augmente ou rétablit l’action fondamentale du poumon qui est de faire descendre l’énergie vers le bas.
Toutes ces actions permettent donc à ce légume d’être un très bon antitussif et de lutter contre les inflammations chroniques du poumon.
Traditionnellement, les chinois savaient qu’il fallait consommer beaucoup de ce produit, lorsqu’un enfant présentait une coqueluche avec une toux très sèche.
Une recette traditionnelle consiste à :
« Cuire à feu doux 250 gr de carottes et 1 douzaine de jujubes préalablement ouvertes dans un litre d’eau. Une fois que la décoction est réduite à 1/3, on la boit en plusieurs fois ».
Une autre recette très intéressante est de :
« Prendre du jus de carotte coupé avec de l’eau chaude dans lequel on rajoute un peu de miel dans le cas de toux sèche ».
*N’oublions pas que peau et poumon font partie du même logiciel en M.T.C.
En Chine, la carotte est réputée pour donner une belle peau. Les Chinois recommandent de consommer ce légume quand on a la peau sèche ou rugueuse. Mais aussi en cas de démangeaison du cuir chevelu ou de pellicules.
Le jus de carotte pris par petites cures de 9 jours à raison de 3-4 petits verres de 40cc peut avoir effectivement un effet de rajeunissement des tissus.
*Aussi bien dans la médecine chinoise, que dans la médecine traditionnelle africaine, la carotte a une action fondamentale au moment de la rougeole.
Les médecins chinois disent que c’est une maladie nécessaire qui a toujours existée et qui permet, dès le plus jeune âge, à l’enfant de se débarrasser des toxines, présentes dans le sang, qu’il a héritées du sang maternel.
Le but du jeu est donc de favoriser au maximum l’irruption des boutons qui ne sont que l’extériorisation de ces toxines.
La carotte joue ce rôle fondamental.
Elle permet aussi, en agissant sur le poumon, de prévenir les risques de complication pulmonaire ou tout au moins de les atténuer. Pour augmenter cet effet, on rajoute dans l’utilisation de la carotte, sous forme de jus ou cuite, de la coriandre.
*Enfin, dans le Yi Lin Zuan Yao, il est dit que « la carotte humecte les Reins, tonifie le Yang originel, le Yuan Yang, réchauffe le foyer inférieur et enfin élimine le froid et l’humidité ».
C’est pour cela que ce légume est plus ou moins contre-indiqué quand on est en excès important de Yang.
Que disent les recherches modernes, quant aux effets de la carotte ?
Toutes ces recherches ne font que conforter les dires de la tradition.
Voyons quelques effets.
*Un dicton populaire dit que la carotte « rend aimable et donne les fesses roses ». Amabilité est, entre autres, à mettre en relation avec un bon fonctionnement du Foie. Les fesses roses, c’est le poumon….
*Elle présente un pouvoir hématopoïétique, à savoir qu’elle stimule la formation des globules rouges (Rate en M.T.C). Elle possède donc d’importantes propriétés antianémiques.
*Elle favorise la sécrétion lactée.
*Elle renforce la résistance de l’épiderme à l’agression des rayons ultraviolets.
*Elle a comme particularité d’avoir une très haute teneur en carotène, précurseur de la vit A, essentielle pour la constitution de la rétine et de la cornée, et donc aussi pour la vision nocturne.
Cette vitamine permet aussi de favoriser la croissance, la cicatrisation, la reconstitution des muqueuses.
En usage externe, la carotte possède des pouvoirs cicatrisants et désinfectants. Il faut alors déposer de la pulpe de carotte crue sur des plaies ou des brûlures.
*D’autre part, le carotène contenu dans la carotte est un très puissant antioxydant qui permet d’éliminer les radicaux libres (Tan en M.T.C.), cause de vieillissement précoce, de maladies cardiovasculaires et de cancers.
Modes d’utilisation
On peut consommer la carotte crue, sautée, bouillie, en jus, à la vapeur, en purée, en soupe.
Il est évident que pour que ces propriétés soient optimales, il convient de se tourner vers les légumes de culture biologique.
Ensuite, il convient de consommer des carottes jeunes et surtout éviter qu’elles soient flétries, ternes et ramollies car elles deviennent alors indigestes.
La peau peut être consommée car elle est très intéressante en tant qu’alicament, à condition que le légume soit bio et surtout bien lavé.
Quelle est la fréquence de consommation ?
Hormis quelques cas spécifiques, dont je vous ai parlé plus haut et où il est possible de faire des cures de neuf jours, s’arrêter une semaine et reprendre ensuite, il convient de ne pas prendre en permanence de ce légume.
Ce n’est pas parce que l’on va en prendre tous les jours pendant un an que l’on va rajeunir de 20 ans.
N’oubliez pas la règle des « neuf jours » :
« On ne devrait pas consommer le même légume, le même fruit, la même protéine (c’est différent pour les céréales) pendant neuf jours d’affilée. Comme il y a 18 repas en 9 jours, cela sous-entend que manger deux fois de la carotte en 9 jours est largement suffisant ».
N’oubliez qu’il y a bien d’autres légumes. Toujours avoir en ligne de mire cette règle : « Consommer les légumes de saison et de région, et être le plus varié possible ».